Le mois d'octobre est depuis 1985 le mois du dépistage du cancer du sein. Le symbole du ruban rose est désormais bien connu et rappelle à chacune l'utilité d'un pronostic rapide. En effet, le cancer du sein est le cancer féminin le plus fréquent et le deuxième cancer dans la population après celui de la prostate.
Après un cancer du sein, les femmes qui ont dû subir une mastectomie ont parfois recours à une reconstruction mammaire. C'est au chirurgien d'apprécier la qualité de la peau et le type de prothèse à utiliser pour retrouver une forme et un volume dans un premier temps, puis une symétrie avec l'autre sein. Après l'obtention d'un équilibre entre les deux seins, on peut reconstruire l'aréole et le mammelon, soit à l'aide d'une auto greffe, soit avec un tatouage. C'est une délicate entreprise de réconciliation pour atténuer la souffrance physique comme psychologique.
Un tatouage pour se réapproprier son corps après un cancer du sein
Pourtant, même en cas de réussite de la reconstruction, il reste parfois des cicatrices et l'impression que le sein reconstruit est un peu plus ferme, plus bombé dans la partie supérieure, sans le tombant naturel d'un sein naturel. C'est pourquoi certaines femmes optent parfois pour un tatouage afin de cacher les cicatrices et embellir les formes obtenues par la chirurgie. C'est un projet qui mérite d'être mûri lorsque l'on a déjà subi des interventions et qui peut être un peu douloureux, mais c'est souvent une manière de retrouver l'estime de soi, de remettre des décolletés, voire d'attirer l'attention et de faire preuve de pédagogie.
Un dessin de tatouage pas comme les autres
Lorsque Sandrine a pris contact avec moi, elle m'a d'abord confié son projet par écrit et m'a demandé si j'étais partante pour recevoir des photos de son sein. J'ai été très touchée par cette proposition et par sa délicatesse. J'ai accepté bien sûr et si j'appréhendais de découvrir un corps couturé, sa mise en garde m'avait beaucoup émue et j'étais prête. Sandrine m'avait envoyé des photos d'elle et de ses essais au crayon sur son propre corps. C'était drôle et très émouvant. J'ai trouvé son sein reconstruit très beau, mais ce n'était pas son avis et j'ai bien compris que c'était précisément là que l'art devait intervenir. Elle avait également sélectionné des images de mes arbres de vie et m'a donné quelques suggestions quant aux espèces de fleurs qu'elle aimait.
Des fleurs pour renaître
Je ne savais pas encore que la plupart des tatouages mammaires étaient des fleurs. Des fleurs sur le sein, des tiges et des pétales pour étendre le dessin et attirer l'oeil vers d'autres zones que la partie cicatricielle, vers le décolleté ou la clavicule, sous l'aisselle. Sandrine hésitait entre un arbre de vie et des fleurs de crocus. Je me suis penchée sur les deux possibilités et lui ai fait des dessins. Le choix du crocus était intrigant. La fleur donne le safran, que l'on récolte en Méditerranée en prélevant les stigmates. Un mot qui n'est pas anodin quand on porte des cicatrices. De plus, si le safran est utilisé en cuisine et en teinture, il a également des vertus thérapeutiques.
Voici les dessins que nous avons élaborés avec les idées de Sandrine :
Un tatouage thérapeutique sur le thème de l'Arbre de vie
Sandrine a finalement choisi le thème de l'arbre de vie et nous l'avons peaufiné ensemble pour qu'il lui ressemble et rappelle sa maternité. Nous avons eu l'occasion de discuter de vive voix plusieurs fois et elle m'a confié qu'elle n'était pas certaine de passer du dessin au tatouage, mais que pouvoir le regarder lui faisait déjà du bien. C'est peut-être le premier pas qui compte dans ce processus de réconciliation. Elle m'a également promis de passer me voir si elle passait à l'acte. J'en serai certainement très très émue !
L'art pour se reconstruire
Depuis cette commande, j'ai eu l'occasion de réaliser d'autres dessins aux vertus thérapeutiques, notamment un rein et un coeur pour des personnes qui avaient subi une chirurgie et qui souhaitaient une oeuvre soit pour se souvenir, soit pour porter chance à l'organe restant ou réparé. C'est une émotion très vive de créer dans ces situations en échangeant avec des personnes qui ne désirent pas réaliser elles-mêmes mais qui ressentent l'apport artistique à leur processus de guérison. Les échanges sont toujours très riches, tant les paroles et les mots choisis que les non-dits et les silences. Si vous aussi vous avez un projet ou si vous souhaitez offrir un cadeau à une personne proche, n'hésitez pas à me contacter.